Sürek et Özdemirv c. Turquie

Affaire résolue Élargit l'expression

Key Details

  • Mode D'expression
    Presse / Journaux
  • Date de la Décision
    juillet 8, 1999
  • Résultat
    CEDH, Violation de l'article 10
  • Numéro de Cas
    Application Nos. 23927/94 & 24277/94
  • Région et Pays
    Turquie, Europe et Asie Centrale
  • Organe Judiciaire
    Cour Européenne des droits de l’homme (CEDH)
  • Type de Loi
    Droit international/régional des droits de l'homme
  • thèmes
    Sécurité nationale
  • Mots-Cles
    Terrorisme, Discours politique

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Analyse de Cas

Résumé du Cas et Résultat

La Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la condamnation du propriétaire et de l’éditeur en chef d’un journal pour la publication d’un entretien avec le dirigeant du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) constituait une violation du droit à la liberté d’expression. Le propriétaire du journal avait était condamné à une amende et l’éditeur en chef à une amende et à six mois de prison. En dépit des préoccupations croissantes quant à la situation sécuritaire dans certaines parties du pays, la Cour a estimé que la simple publication d’un entretien avec une organisation hostile ne pouvait pas justifier l’ingérence dans la liberté d’expression des requérants. La Cour a également estimé que les tribunaux turcs n’ont pas suffisamment pris en considération le droit du public à être informé.


Les Faits

Kamil Tekin Sürek et Yücel Özdemir, actionnaire principal et éditeur en chef de l’hebdomadaire turc Haberde Yorumda Gerçek, ont publié un entretien avec le commandant-adjoint du Parti des Travailleurs du Kurdistan avec une déclaration commune de 4 organisations socialistes. A l’époque de cette affaire, le PKK et les quatre organisations avaient été déclarés groupes terroristes par le gouvernement truc.

L’entretien contenait des questions sur la position des Etats-Unis par rapport au statut du peuple kurde et les points de vue du PKK sur l’environnement politique en mutation en Turquie. Le journaliste a fait référence au territoire turc dans lequel réside la majorité du people kurde comme étant le Kurdistan. La déclaration commune, publiée dans une édition ultérieure, disait en partie :

“Unissons-nous contre le terrorisme d’Etat, contre la répression et l’oppression touchant le peuple kurde, contre les massacres, les meurtres dans la rue, les licenciements et le chômage. Unissons nos forces pour qu’adviennent la liberté, la démocratie et le socialisme ! » Tel est le début de l’appel indiquant que le seul moyen d’action des classes dominantes est le recours à la force et à la violence… Le terrorisme d’Etat et les exécutions dans la rue, dont sont responsables les agents du MIT [service de renseignements de l’Etat], les contre-guérilleros et les bataillons spéciaux doivent prendre fin immédiatement ; les auteurs des massacres et des meurtres doivent rendre des comptes”. [para. 10]

En juin 1992, la cour de sûreté de l’Etat d’Istanbul ordonna la saisie de tous les exemplaires du numéro en question de la revue. Rapidement après, Sürek et Özdemir ont été accusés de propagande séparatiste au titre de la loi relative à la lutte contre le terrorisme. Les deux ont été jugés coupables ; Sürek fut condamné à une amende et Özdemir à une amende ainsi qu’à une peine d’emprisonnement de six mois.

Après le rejet de leur pourvoi en cassation, Sürek et Özdemir ont présenté une requête à la Cour européenne des droits de l’homme.


Aperçu des Décisions

La Cour a cherché à savoir si la poursuite et la condamnation des requérants étaient « nécessaire dans une société démocratique ». La Cour a rappelé les principes fondamentaux qui se dégagent de sa jurisprudence relative à la détermination du besoin social pressant pour restreindre le droit à la liberté d’expression qui doit considérer l’ingérence à la lumière de l’ensemble de l’affaire, y compris la teneur des déclarations litigieuses et le contexte dans lequel elles s’inscrivent. En particulier, il incombe à la Cour de déterminer si la mesure incriminée était « proportionnée aux buts légitimes poursuivis » et si les motifs invoqués par les autorités nationales pour la justifier apparaissent « pertinents et suffisants ». [para. 57]

La Cour a rappelé l’importance des médias dans une société démocratique notant que “Si la presse ne doit pas franchir les bornes fixées en vue, notamment, de la protection des intérêts vitaux de l’Etat, telles la sécurité nationale ou l’intégrité territoriale, contre la menace de violence, ou en vue de la défense de l’ordre ou de la prévention du crime, il lui incombe néanmoins de communiquer des informations et des idées sur des questions politiques, y compris sur celles qui divisent l’opinion.” [para. 58] la Cour a rappelé aussi que l’article 10 de la Convention ne laisse guère de place pour “des restrictions à la liberté d’expression dans le domaine du discours politique ou de questions d’intérêt général” et que “ les limites de la critique admissible sont plus larges à l’égard du gouvernement que d’un simple particulier ou même d’un homme politique.” [para. 60]

A la lumière de ces principes, la Cour a relevé en premier lieu que le fait que les entretiens incriminés aient été accordés par un dirigeant d’une organisation interdite ne saurait en soi justifier la poursuite. Elle a ensuite noté que bien que le chef du PKK ait exprimé une position hostile envers le gouvernement truc, les textes dans leur ensemble ne sauraient passer pour une incitation à la violence ou à la haine. La Cour a expliqué qu’elle avait conscience des préoccupations qu’éprouvent les autorités au sujet de mots ou d’actes susceptibles d’aggraver la situation régnant en matière de sécurité dans le pays, mais qu’elle devait en même prendre en compte “le droit du public de se voir informer d’une autre manière sur la situation dans le Sud-Est de la Turquie, aussi désagréable que cela puisse être pour les autorités.” [para. 61]

La Cour a conclu que la condamnation des requérants se révèle disproportionnée aux buts poursuivis. Dès lors, il y a eu en l’espèce violation du droit à la liberté d’expression.


Direction De La Décision

Info Rapide

La direction de la décision indique si la décision élargit ou réduit l'expression sur la base d'une analyse de l'affaire.

Élargit l'expression

Le jugement de la Cour européenne des droits de l’homme étend la liberté d’expression et notamment en ce qui concerne les restrictions qui se fondent sur des considérations de sécurité nationale ou d’ordre public. La Cour rejette de manière explicite l’affirmation selon laquelle la simple publication de déclarations par des organisations hostiles peut justifier l’imposition de sanctions. Par ailleurs, la Cour souligne la nécessité de pondérer l’objectif légitime de protection de la sécurité nationale ou de l’intégrité territorial en présence de déclarations sujettes à controverses par ou dans les médias par rapport au droit du public à être informé.

Perspective Globale

Info Rapide

La perspective globale montre comment la décision de la Cour a été influencée par les normes d'une ou de plusieurs régions.

Tableau Des Autorités

Lois internationale et/ou régionale connexe

Importance du Cas

Documents Officiels du Cas

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Pièces Jointes:

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