Cybersécurité / cybercriminalité, Respect de la vie privée, protection des données et rétention, Violence contre les orateurs / impunité
Telegraaf Media Nederland Landelijke Media c. Pays-Bas
Pays-Bas
Affaire résolue Résultat mitigé
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La Cour dʼappel nationale argentine en matière criminelle et correctionnelle a décidé de clore lʼenquête sur P. Moyano, car les éléments requis de menace criminelle nʼétaient pas réunis. Luis Majul, un journaliste, a intenté une action pénale contre P. Moyano pensant que Moyano était responsable de la coordination dʼun groupe de personnes ayant accroché des affiches contre lui et sa femme le long des voies publiques. Ces affiches contenaient les insultes « Maître-chanteur et extorqueur de juges et de procureurs » et « Méprisez et souvenez-vous de ce visage ». La Cour dʼappel a considéré que même si les affiches visaient à porter atteinte à la réputation professionnelle de M. Majul, elles nʼatteignaient pas le seuil nécessaire pour constituer une menace de M. Moyano contre le plaignant. La Cour a estimé quʼil nʼétait pas prouvé que les communications contenaient « lʼannonce dʼun préjudice futur certain et manifeste, condition incontournable de la qualification pénale proposée par le demandeur dans son recours » [p. 4].
M. Luis Majul est un journaliste qui a déposé une plainte pénale contre P. Moyano, un dirigeant syndical qui aurait coordonné un groupe de personnes afin dʼaccrocher des affiches pour donner une image négative du journaliste et de son épouse. Les affiches contenaient des insultes telles que « Maître-chanteur et extorqueur de juges et de procureurs » accompagnées dʼune image de lui, de sa femme et du procureur de Buenos Aire.
Suite à ces événements, une enquête criminelle pour menaces a été ouverte contre M. Moyano. Elle a toutefois été classée sans suite par la juge de première instance, qui a estimé quʼil était impossible de poursuivre lʼenquête compte tenu de lʼabsence de lʼélément constitutif du délit consistant en lʼexistence dʼune « annonce dʼun préjudice futur certain et manifeste ». Cette décision a été prise sur la base de lʼarticle 195 du Code de procédure pénale de la Nation et de lʼarticle 45 du Code pénal argentin.
Le plaignant, M. Majul, a fait appel de cette décision les trois raisons suivantes. Premièrement, selon lui, la juge de première instance nʼa interprété les insultes « Maître-chanteur et extorqueur de juges et de procureurs » et « Méprisez et souvenez-vous de ce visage » que comme étant préjudiciables pour le procureur, ignorant quʼelles lʼétaient également pour le journaliste qui était réellement menacé par les affiches. Deuxièmement, en raison des incohérences du jugement sur certains extraites du jugement, lʼaffaire a été classée sans suite parce quʼil nʼavait été possible dʼidentifier les personnes ayant commis le crime, dans dʼautres extraits du jugement, il a été affirmé que lʼaffaire était classée sans suite parce que les actes enquêtés ne pouvaient être qualifiés dʼinfractions. Enfin, M. Majul a affirmé quʼil nʼétait pas pertinent pour lʼenquête de considérer que M. Moyano n’était coupable en raison de son absence sur les lieux où les affiches ont été accrochées, puisquʼil était clair – dʼaprès dʼautres preuves telles que des vidéos quʼil avait incité dʼautres personnes à le faire.
Les juges Ricardo Matías Pinto et Rodolfo Pociello Argerich ont rendu lʼarrêt pour la Cour dʼappel nationale argentine en matière pénale et correctionnelle. La question principale soumise à la Cour était de déterminer si le fait de coordonner un groupe de personnes pour accrocher des affiches portant la photo dʼun journaliste, accompagnées des expressions « Maître-chanteur et extorqueur de juges et de procureurs » et « Méprisez et souvenez-vous de ce visage » constituait des menaces au sens du droit pénal.
Le plaignant a fait valoir que les faits décrits étaient suffisants pour condamner M. Moyano pour menaces, puisque « tous les éléments de preuve corroborent lʼhypothèse selon laquelle les affiches visaient à mettre fin aux enquêtes et à la publication dʼinformations relatives aux affaires judiciaires de P. Moyano, sous la menace de rendre sa vie et celle de sa famille impossible à vivre » [p. 2]. En dʼautres termes, M. Majul a affirmé que les affiches étaient un mécanisme utilisé pour faire taire ses enquêtes journalistiques.
A contrario, les juges ont considéré que les affiches et les expressions qui les accompagnaient nʼétaient pas suffisantes pour condamner M. Moyano pour menaces, car la loi exige un acte par lequel un individu annonce délibérément « quʼil veut causer à autrui un préjudice futur ». Selon les juges de cette affaire, il nʼy avait pas de preuve dʼune intention manifeste et certaine dʼencourir un préjudice futur.
La Cour a en outre précisé que « la désapprobation sociale que peuvent avoir les actes analysés ne saurait se substituer à lʼun des éléments requis par la loi pénale » [p. 4]. Par conséquent, même si la Cour a reconnu que les mesures prises à lʼencontre du journaliste visaient à porter atteinte à sa réputation professionnelle, M. Moyano ne pouvait pas être condamné pour le délit de menace à lʼencontre du journaliste.
En considération de ce qui précède, la Cour a confirmé la décision du juge de première instance de clore lʼenquête.
La direction de la décision indique si la décision élargit ou réduit l'expression sur la base d'une analyse de l'affaire.
Cette décision a une issue mitigée, car, dʼune part, elle ne protège pas le droit à la liberté dʼexpression du journaliste, même sʼil est reconnu que des actes visant à porter atteinte à la réputation du journaliste ont eu lieu ; mais, dʼautre part, elle établit une norme élevée pour engager des poursuites judiciaires contre des personnes qui expriment des opinions inconfortables et choquantes. Lʼaffaire sʼinscrit dans le cadre dʼun débat critique concernant la protection de la liberté dʼexpression, à savoir la mesure à partir de laquelle les expressions susceptibles de saper les activités des chiens de garde comme les journalistes ou les défenseurs des droits de lʼhomme devraient être sanctionnées dʼune manière ou dʼune autre, ce qui pourrait avoir un effet direct sur lʼapplication des normes générales en matière de
liberté dʼexpression.
La perspective globale montre comment la décision de la Cour a été influencée par les normes d'une ou de plusieurs régions.
L'importance du cas fait référence à l'influence du cas et à la manière dont son importance évolue dans le temps.
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